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Pourquoi c'est si difficile

La culpabilité qui accompagne le refus n'est pas anodine. Elle prend racine dans plusieurs mécanismes profonds :

La peur de décevoir. On nous a souvent appris que la valeur d'une personne se mesure à sa disponibilité. Refuser, c'est risquer de perdre l'estime, la reconnaissance, voire l'appartenance au groupe.

La confusion entre personne et rôle. Dans une association, les liens sont tissés autant par le projet commun que par l'affectif. Dire "non" à une tâche peut être perçu — à tort — comme dire "non" à une personne, ou "non" à la cause elle-même.

Le syndrome de l'indispensable. "Si je ne le fais pas, personne ne le fera." Cette pensée, souvent vraie au début, devient une prison dorée. Elle flatte l'ego tout en l'écrasant sous le poids d'une responsabilité dévorante.

Claire en a fait l'expérience dans son association de quartier. Pendant trois ans, elle a géré seule la communication : site web, réseaux sociaux, newsletter mensuelle. "Au début, j'adorais ça. Je me sentais utile, reconnue. Puis ça s'est transformé en cauchemar silencieux." Chaque semaine, les demandes s'accumulaient : "Claire, tu peux faire un post pour l'atelier de samedi ?", "Claire, le lien ne marche plus", "Claire, on n'a rien publié cette semaine". Elle répondait présente, toujours. Jusqu'au jour où, en vacances, elle a reçu six messages d'affilée lui demandant de "juste vite" modifier une photo. Elle s'est retrouvée en pleurs sur une plage, son téléphone à la main, incapable de dire non. Trois mois plus tard, elle quittait l'association sans prévenir. "Je ne voulais plus entendre parler de communication de ma vie."

Le poids de la cohérence idéologique. Dans un milieu engagé, refuser peut sembler contradictoire avec les valeurs que l'on défend. Comment prôner la solidarité tout en refusant de donner un coup de main ?